Une adolescente disparue, un tatouage qui ne parle qu’en énigmes, et une famille politique rongée de l’intérieur. À première vue, Sphinx coche toutes les cases du thriller nordique bien balisé. Mais sous la surface, la série imaginée par Diederik van Rooijen (The Possession of Hannah Grace) se fraye un chemin plus sinueux, entre drame familial, enquête lacunaire et pulsions symboliques.
Déjà diffusée en mars 2024 aux Pays-Bas sur Videoland, Sphinx sera disponible en France dès le 6 juin 2025 sur Paramount+. Découvrons sans plus tarder ce que ce nouveau programme nous réserve en ce début d’été.
Une disparition, un retour… et rien ne s’éclaire vraiment
Le point de départ est brutal : le jour où Eva Moorman prête serment comme nouvelle maire, sa fille Minke, 14 ans, disparaît sans laisser de trace. Trois ans plus tard, Minke réapparaît, visiblement intacte… à un détail près : un tatouage énigmatique dans le dos. La jeune fille reste mutique sur les conditions de sa disparition. Ni victime héroïque ni figure sacrificielle, Minke reste une ombre.
L’enquête est confiée à Asha Trustfull, collègue de l’ex-détective Lucas Moorman, le père de Minke. Mais rapidement, le trouble s’installe. Le ravisseur présumé n’est jamais identifié, mais sa présence semble hanter le récit comme une entité invisible. Au lieu de réponses, Sphinx étire les silences, accumule les regards obliques et les absences de réaction.
Une série sur les ruines intimes, pas sur la résolution
La grande force — ou faiblesse, selon certains — de Sphinx, c’est de ne pas jouer le jeu classique du « whodunit ». Ici, l’enquête policière est secondaire, presque décorative. Ce qui compte, c’est la désintégration souterraine d’une cellule familiale sous pression.
Eva, mère et maire, veut protéger son image publique.
Lucas, père détruit, ex-flic impuissant, se mure dans le déni.
Teun, le frère, regarde la réapparition de Minke comme un retour de fantôme.
Et Minke elle-même, remarquablement jouée par Andrea Vass, oscille entre présence spectrale et mutisme provocateur.
Des symboles, des bêtes et un soupçon de mythologie contemporaine
La série prend un virage symbolique à mesure que d’autres figures apparaissent. Le « Sphinx » du titre n’est pas qu’une métaphore : un réseau de personnages — aux noms animaliers comme Lion, Serpent ou Aigle — semble graviter autour de Minke, dans une forme d’organisation obscure mêlant manipulation mentale et fascination sectaire.
Sallie Harmsen, dans le rôle de Rose (alias « Sphinx »), incarne cette dérive mi-mystique, mi-technologique. On pense à une version européenne et low-fi de Mr. Robot, avec moins d’écran mais plus de tensions viscérales. Il ne s’agit pas ici de conspiration globale, mais de fractures intérieures déguisées en destin collectif.
Une réception locale contrastée
Côté critique, la réception aux Pays-Bas a été partagée :
⭐⭐ sur SerieTotaal, qui regrette un scénario bancal malgré la qualité visuelle et la performance de Vass.
⭐⭐⭐ sur Veronica Superguide, qui salue une réalisation solide malgré des lenteurs.
Le site Nerd Shepherd est plus enthousiaste, évoquant « une écriture fine, un final digne d’Hollywood et une ambition formelle rare dans une production néerlandaise ».
À noter que la série a été projetée en avant-première au prestigieux Tuschinski Theater à Amsterdam en mars 2024, témoignant de l’investissement artistique de Videoland et Horizon Film, la société de production dirigée par Sabine Brian et Boudewijn Rosenmuller.
Informations de diffusion
- Date de sortie en France : 6 juin 2025
- Plateforme : Paramount+
- Créateur et réalisateur : Diederik van Rooijen
- Origine : Pays-Bas
- Casting : Andrea Vass, Rifka Lodeizen, Marcel Hensema, Sil van der Zwan, Sallie Harmsen, Joy Wielkens…
- Nombre d’épisodes : 6 (minisérie bouclée)