e soir sur Arte, une série discrète mais puissante s’invite dans la grille estivale. Lost Boys and Fairies, mini-série britannique en trois épisodes, arrive sans tambour mais avec une sincérité peu commune. Créée par Daf James, auteur gallois et lui-même père adoptif, cette fiction profondément personnelle s’éloigne des représentations lisses pour raconter une parentalité queer traversée par les failles, les silences et les résistances intimes.

Pas de drame larmoyant ni de manifeste militant en vitrine : juste une histoire d’amour, d’héritage et de reconstruction. Le tout rythmé par des interludes de cabaret comme autant d’échappées poétiques.

Une parentalité queer racontée de l’intérieur

Au cœur de Lost Boys and Fairies, on retrouve Gabriel (Siôn Daniel Young), chanteur dans un cabaret queer de Cardiff, et Andy (Fra Fee), son compagnon plus réservé. Le couple entame un parcours d’adoption, encadré par une assistante sociale tenace, Jackie (Elizabeth Berrington). Mais très vite, l’enjeu n’est plus administratif : il devient émotionnel, existentiel.

 

Gabriel porte en lui un passé douloureux. Son enfance, marquée par l’abandon et le rejet, réapparaît sous forme de flashs, de scènes suspendues entre onirisme et douleur brute. Pour prétendre accueillir un enfant, encore faut-il savoir d’où l’on vient.

Entre social-réalisme et envolées musicales

Ce qui fait l’originalité de la série, c’est sa manière d’articuler le quotidien – les rendez-vous en mairie, les frictions conjugales, les doutes ordinaires – avec des respirations musicales venues du cabaret. Ces scènes ne sont pas là pour faire joli : elles matérialisent les émotions contenues, les failles que les mots peinent à dire.

Une œuvre autofictionnelle

Daf James, à l’écriture, puise directement dans son expérience. Lui-même gay, gallois, père adoptif, il compose une fiction qui n’a pas vocation à généraliser mais à témoigner. Dans une interview accordée à BBC Wales, il confie avoir voulu montrer “ce que c’est que d’aimer un enfant qu’on n’a pas conçu, mais pour qui on donnerait tout.”

Le résultat n’est pas un manifeste, mais un geste artistique sincère. La série parle aussi bien à celles et ceux qui ont connu l’adoption qu’à celles et ceux qui vivent avec les absences et les attentes laissées par l’enfance.

Une réception critique élogieuse

Diffusée d’abord sur la BBC en mai 2024, Lost Boys and Fairies a rapidement été saluée pour sa justesse et son émotion contenue. Le Guardian a parlé d’un “petit bijou narratif”, tandis que The Independent saluait “une série tendre et profondément politique, sans jamais hausser le ton”.

Arte ne s’y est pas trompé en récupérant cette fiction à contre-courant pour la proposer au public français. Une diffusion unique ce soir, mais la série reste disponible en replay sur arte.tv jusqu’au 4 décembre 2025.