Il y a des histoires qu’on pense refermées à la dernière page — ou au dernier épisode — mais qui laissent un grésillement, une sensation de fin incomplète, de tension mal digérée. C’est exactement ce que provoque le final de Happy Face, série trouble et troublée, arrivée sur Paramount+ en mars 2025 et conclue le 1er mai dans une ambiance de silence lourd et de téléphone qui sonne au mauvais moment.
Adaptée du podcast éponyme de Melissa Moore, fille du tueur en série Keith Jesperson (connu sous le surnom grotesquement cynique de “Happy Face Killer”), la série suivait les traces d’une héroïne en reconstruction, confrontée à un père charismatique et glaçant — campé avec un sourire acide par Dennis Quaid — et à ses propres fractures intimes.
Sauf qu’au lieu de boucler l’arc narratif dans un élan cathartique, la série choisit de laisser une brèche. Le père survit. Le mari tremble. La vérité reste partielle. Et une question surgit : et maintenant ?
Une fin de saison 1 qui refuse le repos
(SPOILER ALERT) Au terme de huit épisodes, Happy Face avait rempli son cahier des charges : offrir une relecture intime de l’histoire vraie de Melissa, tout en y injectant une tension de thriller domestique. Le twist final, cependant, laisse un goût de sang tiède. Ben, le mari de Melissa, a tenté de faire tuer Keith. Il échoue. Keith survit. Et appelle Ben avec un ricanement au bout du fil : “Je sais ce que tu as essayé de faire. Tu croyais vraiment que je n’en saurais rien, que je n’allais pas finir par le découvrir ?”
Ce que disent les créateurs : pas une suite, un élargissement
La showrunneuse Jennifer Cacicio n’a rien annoncé d’officiel — Paramount+ reste muet. Mais les interviews, ici et là, laissent entendre qu’un plan existe. Elle évoque un “intérêt clair” pour développer davantage l’univers : explorer les conséquences morales pour Melissa, dont le mari a frôlé l’illégalité, et poursuivre la descente dans les abîmes de la généalogie criminelle.
Surtout, la deuxième saison du podcast original offre un fil narratif tout trouvé : celui de Becky Babcock, fille biologique de Diane Downs, condamnée pour le meurtre de sa propre fille en 1984. Une autre histoire vraie, un autre traumatisme hérité, une autre femme face à une génétique impossible à digérer.
Une bascule possible vers l’anthologie ?
Ce serait peut-être la voie la plus intéressante : faire de Happy Face une anthologie sur les enfants de meurtriers célèbres, là où Mindhunter s’intéressait aux tueurs eux-mêmes. Ce déplacement du regard, du bourreau vers les survivants collatéraux, donne à la série sa coloration singulière. On ne cherche plus le monstre. On cherche à vivre après lui.
Et si Dennis Quaid a crevé l’écran en Keith Jesperson, son retour ne serait pas indispensable pour donner une suite légitime à l’univers : d’autres visages, d’autres voix, d’autres stigmates peuvent prendre le relais.
En attendant la confirmation
Aucune annonce officielle pour l’instant. Mais le désir est là, du côté de la créatrice, de Melissa Moore elle-même (“J’ai plein d’autres histoires à raconter”) et d’une partie du public, intrigué par la façon dont la série évite le spectaculaire pour s’accrocher au trouble.
Si Happy Face revient, ce ne sera pas pour faire durer un succès. Ce sera pour gratter là où la justice officielle ne guérit rien, et où les secrets ne meurent pas en prison.
- Saison 1 disponible sur Paramount+ – 8 épisodes.
- Saison 2 ? À suivre.